vendredi 29 mars 2013

Le miroir


   Tous ces lieux te furent familiers, ô Vénitien d'autrefois ! Tes pas les ont fréquentés. Ta bouche a prononcé tous ces noms. Et pourtant, à les entendre, tu ne daignes pas te retourner....
   Cependant, ces objets que nous nous passons de mains en mains sont de ton temps. Cette pendule au timbre grêle et délicat a sonné les heures de ton siècle, à l'époque lointaine de ta jeunesse, les heures de tes jours et de tes plaisirs ! Ce miroir, ne voudrais-tu pas t'y regarder ? Tu y verrais ton visage et nous en aimerions aussi sans doute les yeux vifs et les lèvres vermeilles. Ton sourire nous dirait tes joies, et tu te souviendrais mieux de toi-même en te reconnaissant en cette glace vieillie...
Henri de Régnier, Esquisses vénitiennes, le portrait.













Mes pensées sont restées dans la vieille corte au pied de l'escalier et de la demeure abandonnée...
J'y songe encore lorsque je cherche quelques pièces pour traverser le Grand Canal.
Déjà je traverse à bord du traghetto et retrouve le bruit, les couleurs et les étals de la Pescheria.
Je n'ai pas encore décidé où je vais aller, mais je dois retrouver un "ami" : le ponte Storto.
En me dirigeant vers le rio Terà de la Ca'Molin,, j'aperçois des hommes qui vont et viennent avec des meubles et posent délicatement un vieux miroir d'une porte d'armoire. Une grosse barque attend au pied du pont, pour le transport des objets.
La maison d'angle est flamboyante ! Est-ce la lumière matinale ou les murs viennent-ils de se refaire une beauté ? Tout semble pimpant, vivant et joyeux autour du Ponte Storto, comme ces petits angelots que j'aperçois derrière le grillage de la fenêtre sur le rio de le Becarie.
La dernière fois que je suis passée par là, c'était l'hiver et ses brouillards, c'était la nuit et je n'avais rien remarqué alors. Encore une fois, je ne peux que constater que Venise offre et dévoile que ce qu'elle a envie de nous montrer. J'apprécie ce nouveau regard, même si ce lieu, maintes fois admiré, me touche encore et encore depuis si longtemps !
On continue ...

mercredi 27 mars 2013

La Corte oubliée

   Et cependant elle est à vendre, cette demeure, à vendre tout entière de son "mezzanino" à son "piano nobile", à vendre avec ses vastes salles sonores, ses spacieuses galeries, ses nombreuses chambres, ses escaliers, avec ses immenses greniers, à vendre avec son silence et sa solitude, avec le puits de son vestibule seigneurial et son bout de jardin où gisent et s'effritent dans l'herbe humide deux statues démembrées et moussues, si informes , si usées qu'aucun antiquaire ne voudrait d'elles, tant elles sont de pauvres choses défigurées et lépreuses...

   Il est à vendre, ce beau vieux palais, et il le sera sans doute longtemps, car les acquéreurs ne se pressent pas. Aussi, c'est qu'il est situé dans un des quartiers de Venise que les étrangers ne fréquentent guère ! Pour y parvenir, il faut quitter le Grand Canal et s'engager dans le lacis compliqué des petits canaux. C'est après bien des détours que l'on atteint l'humble rio où se dresse la façade inattendue et d'autant plus imposante qu'elle vous écrase par son manque de perspective. Rien d'étonnant donc à ce que la guerrière pensive du seuil ait à attendre longtemps encore, sans doute, le moment de saluer son nouveau maître, celui dont les pas résonneront, un jour, sur les dalles humides du vestibule et qu'il y fera entrer avec lui la lumière, le bruit et la vie...(Henri de Régnier, esquisses vénitiennes, palais à vendre)  











quelques images de mai 2010...





J'ai toujours aimé les lieux qui racontent une histoire.
Abandonnée, après des années de déclin, la vieille demeure, usée par le temps se dresse toujours là !
Comme à chaque fois que je me retrouve  à Venise, depuis le traghetto en traversant le Grand Canal,  mes yeux cherchent  la Ca'Da Mosto, et  lorsque je traverse le ponte S.S.Apostoli, je jette un regard furtif vers la corte Del Leon Bianco...

Depuis plusieurs années, un échafaudage et une bâche recouvrent la façade du vieil édifice où pourtant
 j'ai lu : Manutenzione straordinaria e restauro conservativo della facciata di Palazzo Ca'da Mosto ici
et que deviendra-t-il ensuite ? Un hôtel, un lieu d'exposition, des appartements de luxe ?

Mais c'est la cour qui m'intrigue toujours, rien ne bouge, l'escalier se dérobe de plus en plus au regard.
Difficile de s'imaginer qu'au XVIIIe siècle, le voyageur qui ne bénéficie pas de l'hospitalité privée,  venait se loger à la "pension des Rois" Il Leon Bianco considérée comme l'une des meilleures dans la Venise des Lumières.

Ce matin, loin de la foule, je reste un petit moment à contempler les vieilles pierres, oubliées, baignées par la lumière printanière...

samedi 23 mars 2013

Primavera : Amore, amore !

Le simple usage des yeux est un bonheur suffisant, à Venise, 
et les observateurs généreux trouvent difficile 
de tenir compte de leurs gains sur cette ligne. 
[Henry James, Venise une impression hâtive, Vacances romaines]







BON WEEK END

vendredi 22 mars 2013

Epanouissement

... À tout instant, Venise nous comble de joies minuscules qui, mises bout à bout, finissent par s'arrondir en une variété singulière de bonheur née d'une absence totale de projets... [Marc Alyn, le piéton de Venise]






Quelques images pour souhaiter la bienvenue au Printemps !
Je suis de retour et comblée une nouvelle fois par cette semaine vénitienne, aux couleurs variées et capricieuses, lumineuses, éclatantes et parfois sombres et ternes,  proches de l'hiver qui se faisait sentir encore un peu...

mardi 12 mars 2013

Dernier regard : Couleurs vénitiennes

"Non, je ne m'en irai pas encore ! J'aime cette froide Venise de novembre en sa verrerie toute laiteuse de brume ou toute grésillant de givre. La pluie même ne me chasserait point. Peu importe quel ciel reflète 
le miroir clair ou trouble de la lagune ! Et, quand bien même toutes les feuilles du jardin se seraient envolées, ne savez-vous pas qu'elles se  changent en ces voiles d'ocre, de pourpre ou de safran qui prolongent sur les eaux comme le souvenir de l'automne ? 
Henri de Régnier, Esquisses vénitiennes





Une des nombreuses calli portant le nom de Forno, en regardant le C.C.C, je compte  une bonne trentaine de calli et deux  Forno Vechio, il y a aussi des corti, sotoportegi, rami et une salizada... d'où l'importance
 du numéro et du quartier dans ces cas là !
Celle-ci est dans San Polo et aboutit au rio de San Stin ... que l'on voit ci-dessous


un peu plus loin une grille sur le rio de la Frescada

Le rio de la Frescada et le ponte de la Scuola

Rio de le Muneghete qui rejoint le rio de San Pantalon

Mes balades arrivent à leur terme, je vais bientôt quitter cette merveilleuse lumière de novembre,  
presque hivernale, aux tons si doux et harmonieux qui me charment toujours autant !
Comme à chaque fois, mon humeur devient mélancolique , je sais que dans quelques heures, je partirai. 
Pour combien de temps ?
Ne soyons pas d'humeur chagrine, ne gâchons pas ce moment qui s'offre à nous et poursuivons la promenade...

lundi 11 mars 2013

Rio et Campiello San Severo

à Cleia


Campiello, ponte et rio San Severo


Sublime !
pour y aller depuis le rio San Provolo et le ponte Diavolo...

"Venise était bien la ville de mes rêves, et tout ce que je m'en étais figuré se trouva encore au-dessous de ce qu'elle m'apparut, et le matin et le soir, et par le calme des beaux jours et par le sombre reflet des orages.
J'aimais cette ville pour elle-même, et c'est la seule au monde que je puisse aimer ainsi car une ville m'a toujours fait l'effet d'une prison que je supporte à cause de mes compagnons de captivité.
À Venise on vivait longtemps seul et l'on comprend qu'au temps de sa splendeur et de sa liberté, ses enfants l'aient presque personnifiée dans leur amour et l'aient chérie non pas comme une chose,
mais comme un être !"
George Sand, histoire de ma vie

Quelques images pour terminer cette longue journée...